La neuroplasticité : le super-pouvoir de votre bébé

Auteur :

Marine Bardin

Publié le 06/02/2023 • Mis à jour le 14/03/2023 •

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3 min.

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Le cerveau d’un nouveau-né se développe à une vitesse inouïe. Tout est découverte, tout est apprentissage. En tant que parent au cerveau déjà bien abouti, vous craignez d'être largué ? Voici quelques conseils pour être le meilleur supporter de votre super-bébé pendant cette période où (presque) tout se joue.

Votre petit Marcel est là, dans vos bras. Joufflu, baveux et adorable. Mais que se passe-t-il derrière ces yeux immenses ? Certains voient le cerveau d’un enfant comme une page blanche sur laquelle tout serait encore à écrire. Or, il s’agit plutôt d’un jardin ; pas un jardin à la française, symétrique et ordonné, non. Plutôt une jungle à défricher : un enchevêtrement de plantes, de racines et de lianes, sans aucun itinéraire. (C’est là que vous vous demandez pourquoi on parle botanique plutôt que développement de l’enfant. Pas d’inquiétude, on y vient.)

Le cerveau de votre bébé, une jungle à explorer

Avant même leur naissance, les bébés enregistrent de nombreux stimulis sensoriels, comme le toucher, la vision ou l'ouïe. Oui, Marcel vous entend quand vous chantez “Alexandriiiie, Alexandraaaa” sous la douche. Mieux que ça : il assimile déjà ce son comme une information qui va structurer son cerveau (vous pourrez toujours étoffer sa playlist plus tard). Ce phénomène s'accélère à la naissance. “Quand le nouveau-né voit le jour, son cerveau compte cent milliards de neurones, qui cessent alors de se multiplier. Mais la fabrication du cerveau est loin d’être terminée, car les connexions entre les neurones, ou “synapses”, commencent à peine à se former : seulement 10 % d’entre elles sont présentes à la naissance ; les 90 % restants se construiront plus tard”, explique la neurobiologiste Catherine Vidal.

Ces connexions tissent progressivement un réseau complexe et évolutif : un sourire, une berceuse, une caresse, une odeur… tout est consigné. Marcel est une véritable éponge. “Le cerveau du bébé présente une plasticité extraordinaire qui le rend sensible à son environnement de façon prodigieuse”, indique le pédopsychiatre Jacques Dayan. Tandis que le cerveau adulte est doté d’environ 300 000 milliards de connexions synaptiques, celui de l'enfant en possède un million de milliards ! C’est-à-dire un million de milliards de voies d’exploration possibles.

 

Dans le cerveau-jungle, cette neuroplasticité se traduit par un peu de jardinage : les voies les plus fréquemment utilisées s’élargissent et se stabilisent, tandis que les chemins les moins empruntés disparaissent progressivement. Cet élagage synaptique va permettre à l’enfant de se focaliser sur certaines tâches, comme l’apprentissage d’une langue ou la reconnaissance de certains visages.

Être un jardinier attentif et confiant

Le cerveau de Marcel se ramifie et se restructure en permanence, en fonction de ses expériences. Il apprend – presque littéralement – comme il respire. Si de votre côté, l'élagage est déjà bien entamé, le rôle que vous jouez dans son appréhension du monde et son développement cognitif est loin d’être secondaire : regarder votre bébé dans les yeux, communiquer à coup de mimiques et d’onomatopées, le faire rire, lui raconter des histoires, le masser, lui chanter une chanson… Chaque geste fait fleurir de nouvelles connexions.

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Si Marcel est curieux, confiant et encouragé, il aura davantage envie d’apprendre et d’explorer. Alors plutôt que de freiner ses découvertes – “Descends de là, tu vas tomber” – vous pouvez au contraire les encadrer : “Attends-moi, je t’accompagne.” Notre expérience d’adulte ne peut remplacer celle que l’enfant doit se faire du monde ; mais lui offrir un environnement bienveillant et stimulant favorise une bonne régulation de son système nerveux et lui donnera une plus grande résilience face aux situations de stress.

Apprendre ne s’arrête jamais

Au-delà des apprentissages progressifs du quotidien, la neuroplasticité favorise notre capacité d’adaptation : déménager au Pérou, apprendre l’italien, quitter un emploi dans le milieu bancaire pour devenir menuisier… Quand on se dit  “je n’y arriverai jamais” ou “j’aurais dû faire ça plus tôt”... Ce n’est tout simplement pas vrai. Plus il est sollicité, plus le cerveau se renforce. Et rien n’est joué d’avance ; une réalité qu’il est d’ailleurs bon de rappeler aux personnes – jeunes et moins jeunes – qui sont, souvent à tort, convaincues de leurs propres limites.

En "poussant le bouchon un peu plus loin", on pourrait même considérer que votre enfant est un acteur-clé de votre propre développement : que les mots d’encouragement que vous lui destinez vous sont aussi bénéfiques ; que les histoires qui l’émerveillent vous fascinent tout autant ; que ses premières expériences vous reconnectent à des moments essentiels de votre enfance, peut-être enfouis sous quelques racines... Et si c’était ça aussi, le super-pouvoir de votre bébé ?

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